Dans un pays où la diversification économique reste un objectif plus qu’une réalité, certaines entreprises algériennes prouvent qu’un autre modèle est possible. De Bouguelez à Tassili, en passant par Star Énergie, plusieurs entreprises algériennes démontrent que la production nationale peut rivaliser avec les marques étrangères.
Rencontrées par Maghreb Émergent lors du Salon international Bevalg, organisé du 4 au 7 octobre, à la SAFEX d’Alger, ces entreprises incarnent le dynamisme d’un secteur productif encore bridé par la lourdeur administrative, les blocages logistiques et un climat économique peu favorable à l’investissement.
Faute d’un accompagnement réel, ce tissu industriel peine à se transformer. Une inertie qui freine la croissance nationale autant qu’elle reflète la difficulté du pays à réduire sa dépendance au baril.
Une demande locale impossible à satisfaire : le cas Bouguelez
L’eau de source Bouguelez, produite par la SARL Essalsabil, en est un symbole. Le produit séduit les consommateurs, mais la société n’arrive plus à suivre la demande. Mme Lynda Lekbir, responsable qualité et recherche-développement, retrace le parcours de l’entreprise : « À mon arrivée, il y a environ trois ans, nous étions près de 180 salariés. Nous sommes aujourd’hui plus de 300. »
Malgré cette croissance, la production reste à son maximum : trois lignes sortent chaque jour 1 500 palettes de bouteilles de 1,5 litre, 1 000 de 0,5 litre et environ 300 de 5 litres. « Nous n’arrivons pas à satisfaire la demande locale, et nous étudions la possibilité d’ajouter d’autres lignes », explique-t-elle.
Mais le principal obstacle se situe ailleurs. Les camions censés acheminer l’eau patientent parfois plusieurs jours avant d’être chargés. Un blocage logistique absurde qui freine la distribution. Comment une entreprise qui crée des emplois et contribue à l’économie nationale peut-elle être ralentie par des lenteurs aussi élémentaires ?
Star Énergie : l’ambition algérienne à l’échelle mondiale
Certaines entreprises parviennent toutefois à contourner les obstacles. Star, productrice d’eaux et de boissons non alcoolisées, a imposé sa marque Star Énergie sur plusieurs marchés étrangers. Son responsable commercial, Ali Aït Brahim, raconte : « Nous exportons vers quatre pays. Notre produit est présent sur trois continents, avec des clients en France, en Libye, en Tunisie et à Dubaï. »
L’entreprise a connu une croissance rapide : « Nous n’avions que deux usines auparavant, nous en comptons aujourd’hui cinq », précise-t-il. Avec plus de 200 camions spécialisés dans la distribution, Star prouve qu’une marque algérienne peut s’ouvrir sur le monde. Un accompagnement ciblé des pouvoirs publics, qu’il s’agisse de logistique ou de promotion, pourrait transformer cette réussite isolée en modèle national.
Tassili : la rigueur de la qualité, quel qu’en soit le coût
Dans le secteur laitier, Tassili incarne un autre visage de cette excellence nationale. Fidèle à une exigence constante, la marque s’est imposée par la qualité de ses produits. Sa directrice des ventes, Ouahiba Seddar, en explique les limites : « La rareté de nos produits s’explique par le manque de lait cru, surtout en hiver. Nous sommes très exigeants sur la qualité du lait, car c’est elle qui détermine celle de nos produits. »
Cette exigence conduit l’entreprise à réduire ses volumes hors saison. « À part au printemps, où le lait est abondant et de bonne qualité, nous sommes dépendants de ce facteur », ajoute-t-elle. Une meilleure coordination avec la filière amont, notamment l’élevage, permettrait pourtant d’assurer une production stable tout au long de l’année.
Une économie qui s’essouffle faute d’air
De Bouguelez à Star Énergie, en passant par Tassili, les exemples ne manquent pas pour démontrer la vitalité d’un secteur productif souvent ignoré. Ces entreprises prouvent que l’Algérie dispose d’un savoir-faire réel et d’un marché intérieur solide.
Mais laissées seules face à la bureaucratie, elles peinent à transformer l’essai. L’inertie administrative, les blocages de transport et l’absence de plan d’appui ciblé agissent comme un frein structurel.