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Hachemi Siagh sur Radio M : « Recourir à la finance islamique est plus sain que d’aller dans les coffres des banques »

Par Yacine Temlali
6 octobre 2015

Pour cet expert, l’appel lancé par les autorités en direction des détenteurs de capitaux « informels » pour déposer leur argent dans les banques contre le paiement d’une taxe de 7% est « un mauvais signal » à l’international parce qu’il est difficile de déterminer la traçabilité de cet argent.



En à peine une quarantaine d’années d’existence, la finance islamique – lancée au milieu des années 1970 avec la création de la Banque islamique de Dubaï après une expérience non réussie en Egypte dans les années 1950 – connaît un développement exponentiel. Aujourd’hui il existe 500 institutions financières islamiques et d’assurance takaful à travers le monde. En 2014, lors de la 10e édition du Forum mondial sur la finance alternative tenu à Dubaï, aux Émirats Arabes Unis, la finance islamique pesait 1.800 milliards de dollars. En Afrique, les actifs de cette finance alternative s’élèvent 78 milliards de dollars, soit 5% du total des actifs de cette à l’échelle mondiale. « Un grain de sable par rapport à la finance conventionnelle mais cela donne une idée sur la croissance de cette finance alternative », fait observer Hachemi Siagh, expert financier international, invité aujourd’hui du Direct de Radio M, la webradio de Maghreb Émergent.

Pourquoi, alors, l’Algérie est-elle restée en marge du développement de la finance islamique ? A cette question, Hachemi Siagh répond qu’il n’y a pas que notre pays qui est restée en marge, puisque même des pays du Golfe, à l’instar du Sultanat d’Oman, ont émis des réticences, certains pour des raisons politiques, tandis que d’autres y ont été réticents pour des raisons techniques.

Hachemi Siagh souligne néanmoins qu’en Algérie, l’absence de cadre réglementaire a freiné le développement de cette finance alternative. « Pour accueillir la finance islamique, il faudrait qu’il y ait un cadre réglementaire. Les banques islamiques en tant que telles ne sont pas des banques, les normes s’appliquant aux banques conventionnelles ne le sont pas en ce qui concerne les banques islamiques, tient-il à préciser expliquant que les banques islamiques ne sont que des simples fonds. 

 

La finance islamique un « gisement » non négligeable pour l’Algérie 

 

Le sukuk, équivalent islamique du financement obligataire pour les entreprises, reste l’instrument le plus attractif pour attirer l’épargne, selon Hachemi Siagh qui souligne que cet instrument sans taux d’intérêt est à mi-chemin entre une action et une obligation. En 2010, la masse de sukuk émise dans le monde ne dépassait pas 10 milliards de dollars. En 2013, elle est passée à 400 voire 500 milliards de dollars. Une étude c souligne qu’en 2017, les sukuk arriveront à 900 milliards de dollars.

« C’est une explosion exponentielle, parce qu’en plus d’un bon rendement le sukuk n’est pas corrélé avec le marché (hausse et baisse des taux d’intérêts) », observe Hachemi Siagh. Pour cet expert, le meilleur moyen de financer les projets étatiques c’est le sukuk qui exige, toutefois, un ancrage juridique. En 2012, l’Arabie Saoudite a émis pour la première fois un sukuk pour financer l’agrandissement de l’aéroport de Djeddah. Lancé à 8 milliards de dollars, le sukuk a été souscrit à 23 milliards de dollars.

En somme, la finance islamique offre un « gisement » non négligeable pour l’Algérie qu’il faut aller chercher, souligne H. Siagh. Pour cet expert, l’appel lancé par les autorités en direction des détenteurs de capitaux « informels » pour déposer leur argent dans les banques contre le paiement d’une taxe de 7% est « un mauvais signal » à l’international.

Essentiellement, estime Siagh, pour la raison qu’il est difficile de déterminer la traçabilité de cet argent. « Pour que les banques restent indemnes de ce risque de réputation », Hachemi Siagh affirme que recourir au sukuk pour financer les projets est « beaucoup plus sain que d’aller dans les coffres des banques ». En clair, il propose que, plutôt que de juste déposer l’argent dans les banques pour se mettre en conformité, qu’il aille financer des projets sous une forme aussi corrélée à la finance islamique. 

Des amendements des cadres légal et fiscal

 

Selon M. Siagh, en l’absence de cadre législatif et légal qui statue sur le caractère islamique des organismes financiers, les épargnants algériens vont réagir de la même manière que les organismes du secteur public en considérant que c’est encore de la finance conventionnelle « maquillée ». Dans ce, dit-il, « il y a deux choses qu’il faut faire : des amendements dans le cadre légal et des amendements dans le cadre fiscal. Car, les transactions islamiques ce sont des opérations commerciales de vente et d’achat, ce n’est pas à proprement parler du financement ». Et d’expliciter son propos en disant : « Si vous vous présentez à une banque islamique et demandez un prêt, elle ne va pas vous le donner, mais elle va vous proposer une opération de murabaha : c’est-à-dire qu’elle va acheter le produit que vous voulez et vous le revend concomitamment ».

Le premier pays qui a mis en place ce système de réglementation de la finance islamique a été le Bahreïn. Malgré les contraintes de la loi, deux opérateurs islamiques font du bon business, il s’agit en l’occurrence des banques Al Baraka et Al Salam. Elles utilisent le leasing (sans taux d’intérêt) et Al Musharaka en prenant des participations directes. « Aujourd’hui, une banque conventionnelle ne peut pas prendre des participations pendant longtemps dans une entreprise car c’est interdit par la Banque centrale.

 

Pour écouter l’émission.

 

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