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Internationale

Hernando De Soto: les informels ne veulent pas rester dans l’extra-légal (audio)

Par Mohamed Boukhalfa
15 décembre 2015

 

Pour l’économiste Péruvien Hernando De Soto, les opérateurs du secteur informel savent que les taxes qu’ils ne payent pas à l’Etat pourraient être payées en bakchich. D’où la nécessité de les convaincre de la démarche de la formalisation et du coût qu’elles vont engendrer pour leurs activités.

 

 

«Les pauvres ne sont pas un problème, ils sont la solution» a réitéré au micro de Radio M Hernando de Soto, l’auteur de l’ouvrage «le mystère du Capital» publié en 2005. «L’invité du direct» a rappelé qu’il était déjà venu en Algérie en 2012 pour discuter avec le gouvernement sur l’économie informelle. Il admet ainsi qu’il n’a pas réussi à «convaincre» les autorités algériennes de ses idées, au contraire d’autres pays voisins tels que la Tunisie, l’Egypte ou la Libye. Pour le fondateur d’ILD, think thank économique classé comme le deuxième plus influent dans le monde par le journal anglais The Economist, «l’idée est de se rendre compte que les informels ne veulent pas être informel».  D’après des calculs basés sur des informations récoltées à travers le monde, Hernando de Soto a établi que les marchands informels ne restaient en moyenne que 13 années dans l’extra-légal. «Au bout de 13 ans, il veut sortir de la rue car ce n’est pas un lieu idéal» estime t-il. «Pour sortir, il a besoin de construire des marchés et des centres commerciaux pour faire de la concurrence».

 

«L’informel englobe tous ceux qui n’ont pas les outils pour se développer dans un grand marché»

 

Hernando de Soto a une vision plutôt extensive de l’économie informelle. Il rejette ainsi la définition selon laquelle l’informel ne concernerait que les gens qui ne payent pas leurs impôts. Il juge cette définition «restrictive» et estime en effet que l’économie informelle «englobe tous ceux qui n’ont pas les outils pour se développer dans un grand marché». Il considère ainsi que les entreprises unipersonnelles font également partie de l’économie informelle.  Ce genre d’entreprises assez communes en Algérie, est limité à la personne de son propriétaire. L’économiste relève ainsi que ces entreprises s’apparentent à la mise de «tout un patrimoine dans une partie de poker». Il analyse ainsi qu’ «au fond, ces entreprises ne peuvent pas entrer dans le marché» car elles manquent de capacité d’investissement. Revenant sur la fermeture de certains marchés informels par le gouvernement, l’économiste péruvien  estime que ces marchés sont ce «qui nous impressionne le plus mais c’est (en fait) la partie la plus petite de l’économie informelle».

 

«Aux Etats-Unis ils font des marches pour leurs droits alors qu’au Pérou les gens fuient le droit»

 

Pour lui, l’urgence est donc de «quantifier» le problème pour que les gouvernements puissent en saisir la portée. Même s’il admet ne pas pouvoir donner de chiffres pour le marché algérien, il relève que chez les pays voisins, la part de l’économie informelle sur l’économie réelle varie «entre 70 et 85%». «Nous, le tiers monde représentons 90% de la population mondiale. On sait ce qu’est le marché informel. Mais ce n’est pas clair pour l’Occident» ajoute t-il, avant de pointer du doigt «le problème de la mauvaise gouvernance» qui constitue la principale cause des problèmes que rencontrent ces pays. Prenant exemple sur son pays, le Pérou, il raconte: «chez nous les latino-américains, il y a des millions de personnes qui sont parties en Amérique du Nord. Aux Etats-Unis, ils font des marches pour leurs droits alors qu’à l’intérieur du pays les gens fuient le droit.  Donc le problème n’est pas qu’ils ne veulent pas de droit, le problème c’est que la loi ne veut pas d’eux». Il préconise ainsi de s’appuyer d’abord sur les acteurs du marché de l’informel pour légiférer sur ce problème: «la meilleure façon de savoir quelle est la solution, c’est de parler avec le circuit informel. La démocratie ce n’est pas seulement voter; mais c’est aussi écouter» affirme t-il. 

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