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La révision de loi électorale vue par les « politiques » !

Par Mecipsa Amokrane 20 janvier 2021

Le projet de révision de la loi électorale dont la première mouture a été rendue publique dimanche, vient d’être officiellement distribué à des partis politiques et des membres de la société civile en Algérie. Contactés par Radio M ils ont livré leur lecture du projet de loi organique.

A commencer par le constitutionnalise, Ahmed Betatache, qui a expliqué qu’il s’agit d’un projet de loi organique, qui peut être amendé à différents stades : à la commission chargée de l’élaboration de la loi électorale, au niveau du gouvernement (l’avant-projet), au conseil des ministres (le projet de loi), ou à l’Assemblée populaire nationale (APN), car le Conseil de Nation n’a pas vocation à amender, voire même au niveau du Conseil constitutionnel « parce qu’il y a des dispositions anticonstitutionnelles à l’instar de l’élection du chef de l’autorité nationale indépendante des élections».

D’après lui, ce projet est une préparation à l’adaptation de la loi électorale aux récents amendements constitutionnels. « La loi électorale a été fusionnée avec la loi relative à l’autorité indépendante pour l’organisation des élections, qui n’avait aucun fondement constitutionnel » a-t-il noté.

Selon le juriste, ce texte consacre ce que la constitution disposait concernant la « subordination de l’autorité indépendante (l’Autorité nationale indépendante des élections, ANIE) et son manque d’indépendance », « un paradoxe majeur » a signalé Ahmed Betatache, puisque tous les membres de l’autorité sont nommés par le président de la République, président de l’autorité exécutive. « Ainsi elle est devenue une administration de l’autorité exécutive » a-t-il précisé.

« En conséquence, l’organisation des élections a été transférée d’une administration (ministère de l’Intérieur, wilayas et communes) à une autre administration qui est l’ANIE » a indiqué le professeur.

« Selon ce texte, l’autorité ne comprend que deux organes, un organe de délibération composé de 15 membres et un organe exécutif qui est le chef de l’autorité. Les délégations des wilayas et communes ne sont pas considérés comme faisant partie de l’autorité, mais sont plutôt des extensions, et ce terme est ambigu dans la loi » a encore fait savoir notre interlocuteur.

Pour lui, la plupart des pouvoirs sont concentrés entre les mains d’une seule personne, qui est le président de l’ANIE !

Ce qui est nouveau dans ce texte, c’est l’adoption d’une méthode de vote par liste ouverte « sans mélange », ce qui signifie d’après le juriste, que l’électeur choisit une liste, et dans cette liste, il choisit les candidats qu’il veut, alors que dans la méthode de liste ouverte avec mélange, il choisit les noms qu’il veut dans des listes différentes.

 « La raison du choix de cette méthode est de lutter contre ce qui a été observé par les élections précédentes en termes de trafic des premières places dans les listes des grands partis. Le problème posé avec cette méthode est qu’un grand pourcentage d’électeurs ne savent pas lire, alors que ce schéma suppose que l’électeur s’isole et choisit une liste parmi plusieurs listes, puis sélectionne des candidats parmi une liste, et cela ne peut être réalisé que pour ceux qui lisent bien » a estimé le constitutionnalise.

« Dans le système à scrutin unique ou à liste fermée, le problème ne se pose pas car l’électeur, même s’il ne lit pas bien, peut distinguer la feuille électorale à travers le tête de liste, ou du symbole du parti ou de la liste » a ajouté Ahmed Betatache.

Ce texte introduit également le principe de la parité entre les hommes et les femmes et allouant un pourcentage d’au moins un tiers aux jeunes. A cet effet, le juriste pense que le but est d’impliquer les femmes et les jeunes dans le travail politique au sein des conseils élus, mais il s’agit d’une procédure avec des avantages et des inconvénients. « Les expériences passées en matière de la participation des femmes ont montré les limites de ces mesures. Il est plus approprié d’élaborer des textes qui permettent aux femmes et les jeunes d’être présents dans les partis politiques afin de former des femmes et des jeunes cadres, puis à un stade ultérieur imposer leur présence au sein des conseils élus et non l’inverse » a-til signalé.

Déçu, le coordinateur du Forum civil pour le changement, Abderrahmane Arar, qui compte participer aux prochaines élections, a indiqué à Radio M « qu’il n’y a malheureusement pas de changement » dans ce nouveau projet de loi électorale.

Il pense lui aussi que les points exigeant la parité hommes femmes et un pourcentage minimum de participation des jeunes n’est pas la meilleure façon de consacrer un changement. « L’expérience du système du quota nous a déjà démontrés que ça ouvre la voie à n’importe qui !  Que ce soit un homme ou une femme, c’est les compétences qui doivent primer » a noté Abderrahmane Arar.  

Il a également souligné qu’il souhaite la suppression du point exigeant un seuil de 4% pour les acteurs politiques. « Les élections organisées avant le Hirak du 22 février 2019 sont fraudées, comment rester sur ce seuil erroné ? » s’est-il interrogé. « Il faut ouvrir la course électorale aux nouvelles dynamiques et arrêter de consacrer les anciennes figures » a martelé le coordinateur du forum.

Pour lui, les prochaines élections risquent de connaître le même sort du que le référendum sur la Constitution en mois de novembre dernier, boycotté massivement par les algériens, si le pouvoir algérien ne procède pas à de vraies réformes. Il a noté à cet effet que son équipe présentera des propositions afin d’améliorer ledit projet de loi.

Interrogé sur une éventuelle participation de son parti aux prochaines législatives ? Le secrétaire national à la communication du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD), Atmane Mazouz, a déclaré à Radio M que son parti ne peut pas « être associé à un projet dont les promoteurs ne croient pas aux vertus de la démocratie et au principe de l’alternance au pouvoir ».

Il explique que « les algériennes et les algériens n’admettront aucunement de prendre part à un processus qui s’inscrit en contradiction de la remise des clés de la souveraineté au peuple ».

Il a ajouté que « le projet de la révision de la loi électorale n’aura d’intérêt et d’incidence tant que la fraude fait office de loi fondamentale dans un pays livré à la corruption des décideurs et des institutions illégitimes ». « Au RCD, indépendamment de l’institution à pourvoir en élus, les institutions en charge de l’organisation des élections sont disqualifiées et ne peuvent prétendre garantir des élections crédibles et transparentes. L’ANIE dont le chef doit sa désignation à l’ex chef de l’Etat-major de l’armée ne peut se prévaloir d’aucun crédit pour garantir la légitimation des institutions et du pouvoir » a conclu le chargé à la communication du RCD.

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