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Algérie

Le gouvernement algérien reste sans réaction face au nouveau choc financier externe

Par Maghreb Émergent
13 octobre 2014
Le ministre des finances Mohamed Djellab n'a rien modifié à la loi de finance 2015 malgré le retournement des prix du pétrole sur les marchés mondiaux (DR)

La rapidité du retournement de situation qui affecte aujourd’hui l’état des finances de notre pays, et la réduction accélérée de ses marges de manœuvre financières semblent avoir pris de court, à la fois les observateurs et les principaux acteurs de l’économie algérienne.

 

L’éclatante santé financière qui, naguère encore valait à l’Algérie les compliments des institutions financières internationales pour sa « stabilité macroéconomique » semble déjà n’être plus qu’un souvenir. La politique macroéconomique extraordinairement laxiste mise en œuvre par les autorités algériennes depuis l’année 2011 a conduit dans une première étape, et en moins de 3 ans à la disparition complète des excédents financiers de la balance des paiements. On est ainsi passé de 20 milliards de dollars d’excédent en 2011 à 12 milliards en 2012 et, ainsi que l’indiquait voici encore quelques mois la Banque d’Algérie, à une situation de « quasi équilibre » en 2013.
Dégradation accélérée en 2014
Au cours de l’année 2014, et particulièrement depuis le début de l’été, les évènements se sont encore accélérés. Confirmation de la réduction de nos revenus pétroliers en raison de la poursuite de la baisse de nos exportations en volume et surtout, depuis le mois de juin, dégringolade du prix du baril qui a déjà perdu plus de 20% de sa valeur en 4 mois. Comme nos importations ont continué à augmenter, même à un rythme réduit depuis le début de l’année, les perspectives d’un déficit important de nos paiements courants en 2014 se précisent. L’aspect le plus préoccupant de cette évolution est que le montant de ce déficit est désormais régulièrement réévalué à la hausse et surtout, que notre pays semble désormais durablement installé dans une tendance au gonflement des déficits de ses paiements extérieurs.
Le FMI et la Banque Mondiale très réactifs
Face à cette dégradation accélérée, ce sont les institutions financières internationales qui se sont montré les plus réactives au cours des dernières semaines. La Banque mondiale évoquait la semaine dernière, un fort recul du solde du compte courant de l’Algérie de + 9,9% du PIB en 2011, à un déficit de 0,5% en 2014, en pointant l’effet particulièrement « corrosif » des subventions énergétiques qui représentent aujourd’hui plus de 10% de la richesse nationale .
Le FMI a été encore plus prompt à réagir en prenant en compte les évolutions les plus récentes. Dans son dernier rapport sur les perspectives économiques mondiales publié voici quelques jours, il évoque un « solde de la balance des comptes courants de l’Algérie qui devrait être négatif pour s’établir à -3% du PIB en 2014 et à -2,9% en 2015, contre un solde positif de 0,4% en 2013 ». Le FMI a donc fortement révisé ses prévisions d’avril dernier, où il tablait encore sur un solde de la balance des comptes courants positifs à +0,5% du PIB pour 2014. Embrayant sur ces prévisions qui évoquent donc des déficits extérieurs de l’ordre de plus 7 milliards de dollars par an pour les deux prochaines années, la délégation du Fonds monétaire présente à Alger au cours des dernières semaines dans le cadre des consultations annuelles, a rapidement mis en évidence «l’accentuation des risques qui pèsent sur la stabilité macroéconomique de l’Algérie», au regard notamment du recul de sa production d’hydrocarbures et de sa «forte consommation intérieure».
La Banque d’Algérie reste sans voix ….
Par contraste, les autorités financières algériennes paraissent avoir été prises de vitesse par les évolutions récentes de nos paiements extérieurs. Même la Banque d’Algérie qui, jusqu’à voici encore quelques mois, délivrait des avertissements à répétition sur la « vulnérabilité de notre balance des paiement à l’égard des chocs externes », semble aujourd’hui rester sans voix au moment où les scénarii les plus sombres semblent se concrétiser. Prise de court, l’institution de la Villa Joly campe encore sur les conclusions de son rapport de conjoncture pour le premier trimestre 2014 publié au mois d’aout dernier, qui évoquait un tassement des importations et un déficit des paiements courants limité à moins de 500 millions de dollars au cours des 3 premiers mois de l’année.
La loi de finance 2015, comme si de rien n’était
Mais la palme de l’imprévision revient incontestablement au ministère des finances qui va proposer, imperturbablement, dans quelques jours, au parlementaires l’approbation d’une loi de finance pour 2015 caractérisée par « une démarche prudente et réaliste, en conformité avec les capacités économiques et financières du pays»(sic). Une démarche prudente et réaliste qui a conduit les fonctionnaires de Ben Aknoun à caler le budget de l’Etat pour 2015 sur un prix du baril de pétrole brut à 37 dollars pour le prix de référence fiscal et à 100 dollars pour le prix moyen du marché. Il prévoit également une augmentation des importations de marchandises de 6,2% par rapport à 2014 à 65,4 milliards de dollars, contre une progression des exportations d’hydrocarbures de 3,68%, à 66 milliards de dollars.
L’avant projet de la loi de finances pour 2015 prévoit en outre des dépenses budgétaires qui devraient s’établir en 2015 à 8 858 milliards de dinars (près de 110 milliards de dollars) en hausse de 15,7% par rapport aux dépenses de la loi de finances pour 2014. Une hausse qui s’explique par la croissance aussi bien des dépenses de fonctionnement (+5,5%), que celles d’équipement (+32,1%).
Yazid Taleb

 

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