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Les patrons emblématiques de l’ère Bouteflika marquent leur territoire

Par Yazid Ferhat
10 décembre 2014
Laid Benamor, président de la CACI et Ali Haddad, président du FCE

Le patronat algérien amorce un virage délicat, avec l’intronisation de Ali Haddad à la présidence du Forum des Chefs d’entreprises. Pendant ce temps, Laïd Benamor veut relancer une chambre de commerce pour en faire un instrument économique.

 

Les patrons emblématiques de l’ère Bouteflika affichent leur volonté de coller au plus près au pouvoir, tout en s’attelant à mener les transformations nécessaires au  dispositif mis en place parallèlement au quatrième mandat. Ali Haddad, patron de l’ETRHB, premier groupe de travaux publics du pays, et Laïd Benamor, présent dans l’agro-alimentaire, ont pris les rênes du Forum du chef d’entreprises (FCE) et de la Chambre de commerce et d’industrie (CACI). Ils tentent de les arrimer à la politique gouvernementale, tout en modifiant légèrement leurs trajectoires respectives, afin de d’en faire des instruments plus efficaces au service de l’entreprise.

Ali Haddad ne cache pas sa volonté de « travailler dans le sillage du gouvernement », tout comme le proclamait son prédécesseur Rédha Hamiani. Les chefs d’entreprises, qui espèrent tirer profit de la proximité avec le pouvoir, s’en félicitent. Dès son intronisation, Ali Haddad a affirmé qu’il continuerait à travailler étroitement avec les autorités, tout en défendant l’entreprise. «Nous allons dire toute la vérité. Nous n’allons pas nous taire sur ce qui n’arrange pas l’entreprise », avait-il annoncé. Sans se démarquer des positions traditionnelles du FCE, il veut cependant ménager certains courants, en prônant plus de souplesse sur la règle du 51/49. Il souhaite qu’elle soit « assouplie », et limitée à ce qu’il considère comme « branches ou filières stratégiques, où la partie algérienne est obligatoirement majoritaire, comme l’énergie, les hydrocarbures, les TIC, l’eau, les banques, les assurances et le transport ».

Apaisement

Mais Ali Haddad a d’autres priorités. D’une part, asseoir son autorité sur le FCE, où il a été élu à l’unanimité, sa candidature étant seule en lice ; d’autre part, rétablir l’image écornée d’un FCE trop docile, trop proche du pouvoir, et peu moderne. M. Haddad a d’ailleurs appelé ceux qui avaient quitté le FCE pour protester contre le soutien au quatrième mandat du président Bouteflika à revenir au son de l’organisation. Deux chefs d’entreprises très médiatiques, Issaad Rebrab, patron de Cevital, et Slim Othmani, PDG de NCA Rouiba, avaient quitté l’organisation pour protester contre son alignement sur le président Bouteflika en avril dernier.

Par ailleurs, si le FCE assure un lobbying très efficace, c’est à la chambre de commerce que se trouvent les grandes affaires. Le nouveau directeur, Laïd Benamor, affiche sa volonté de moderniser une institution en ruines, court-circuitée par les réseaux et les opportunités d’affaires offertes par les relations personnelles. Résultat : les chambres de commerces et d’industrie sont « désertées », selon Laïd Benamor. « Les gens ne veulent pas y aller, ils y adhèrent difficilement », a-t-il déclaré. Les chambres de commerce sont peu outillées, et fonctionnent au ralenti. Elles ne disposent pas d’informations sur l’économie algérienne. « Qui produit quoi ? On n’a pas cette information », reconnait le nouveau président.

Beaucoup d’opportunités en Algérie

Partisan lui aussi de l’idée de « plus de proximité avec les pouvoirs publics », M. Benamor affirme que les chambres de commerce peuvent contribuer à améliorer le climat des affaires, car « les opportunités existent », selon lui, « nombreuses, offrant la possibilité de réaliser des bénéfices ». Il affirme même qu’il y a « plus d’opportunités de faire des affaires en Algérie qu’ailleurs ». Il en cite comme  preuve les filières des entreprises étrangères installées en Algérie, souvent classées premières au sein de leurs groupes respectifs. Selon lui, l’Algérie offre «un marché et une marge de manœuvre aux opérateurs pour se développer».

Il reconnait toutefois que « l’acte d’investir est difficile, il faut le faciliter et encourager les investisseurs ». Comment ? Par des mesures pratiques qu’il propose. Il se garde de vouloir soulever des problèmes, il « préfère apporter des solutions ». Il demande « plus de facilités dans l’impôt pour réduire l’informel », mais ne se prononce pas sur une éventuelle amnistie fiscale, réclamée par certaines organisations patronales. Il préfère « préparer un dossier pour aller à un projet élaboré », mais il demande « une plus grande stabilité du dinar pour avoir de la visibilité ». Quant aux zones industrielles, sujet de controverse récurrent, il propose qu’elles soient gérées par les entreprises.

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