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Algérie

Mouloud Hedir sur les licences d’importation : « Tout le monde sait que ces procédés éculés ne marchent pas »

Par Maghreb Émergent 18 avril 2017
Vue sur le port d'Oran (Ph DJS)

 

 

Mouloud Hedir qui était  lundi « l’invité du direct  » de Radio M ne croit pas beaucoup aux chances de succès de la stratégie de contingentement des importations mise en œuvre par les pouvoirs publics algériens depuis un peu plus d’une année et renforcée au cours des dernières semaines.

 

 

Pour réaliser les ajustements rendus nécessaire par la forte réduction de nos revenus extérieurs, l’expert algérien exprime des doutes sur l’efficacité d’une « gestion des importations par les quotas » qui nous éloigne des enjeux véritables d’un commerce extérieur  » qui doit être mis au service du développement de l’économie. « 

Le moyen le plus simple et le moins risqué pour arriver à court terme au résultat recherché par les pouvoirs publics serait plutôt du côté de l’utilisation des leviers économiques et non pas administratifs. Plutôt donc « l’ajustement de la valeur du dinar et éventuellement des droits de douanes ciblés que des quotas administrés. « 

Même scepticisme à propos des 15 milliards de dollars de réduction des importations annoncés par le gouvernement pour cette année. Les 21secteurs soumis à licences ne permettront pas de toute évidence d’atteindre un tel objectif. De toutes façons pour l’expert algérien : « le pire dans tout cela, c’est que tout le monde sait que ces procédés éculés ne marchent pas. »

 

Une focalisation excessive sur les importations

 
 

Mouloud Hedir regrette la focalisation actuelle de la politique du gouvernement mais aussi du débat public et de l’attention des médias sur le seul segment des importations voire de façon dérisoire sur « le commerce des bananes ». Pour l’ancien Haut fonctionnaire, « c’est l’ensemble de notre commerce extérieur qu’il faut mettre en perspective pour en faire un instrument du développement économique du pays « .

 Au lieu de chercher à diminuer l’importation, « la vision saine devrait, au contraire, de se donner les moyens de doubler, voire tripler à terme leur volume, en doublant ou triplant dans le même temps celui de nos exportations. Quelle est cette malédiction qui condamnerait notre pays à n’exporter que du pétrole ou du gaz ? Pourquoi la politique économique s’échinerait-elle à promouvoir des rentiers plutôt que des investisseurs et des producteurs ? Jusqu’à quand allons-nous continuer de censurer des investisseurs étrangers qui souhaitent produire sur notre territoire, là où nous acceptons sans sourciller leurs réseaux commerciaux  » ?

 Ce que d’aucuns désignent comme la gestion administrée du commerce extérieur n’est, dans les faits, que « l’expression d’une politique commerciale externe très peu élaborée et aux contours illisibles. « 

 

  Pour un commerce extérieur « au service du développement de l’économie « 

 

 L’expert algérien plaide en faveur d’une véritable reprise en main des rênes de notre politique commerciale extérieure .Il tente de tracer les contours d’une telle démarche : « La politique industrielle élaborée par le gouvernement ne saurait être viable sans une cohérence assurée entre les projets industriels à promouvoir et les normes souhaitables en termes de concurrence avec les produits étrangers qui entrent aujourd’hui notre marché.

 De même, dans l’agriculture une politique de renouveau agricole à base de soutiens orientés vers le développement de productions locales sera vouée à l’échec en l’absence de normes de protection du marché interne.  Le même raisonnement peut être tenu dans l’ensemble des secteurs d’activité, y compris ceux des services à commencer par les grands secteurs comme les transports maritimes ou aériens, le tourisme, les télécommunications, les services portuaires. …. « 

La politique commerciale externe n’est « ni une affaire de principes théoriques ni une somme de problèmes administratifs. Elle doit avoir un contenu concret et précis et être le prolongement d’une politique de développement économique nationale. »

 

 « Personne ne gère vraiment l’Accord d’association « 

 

« Personne ne gère vraiment l’Accord d’association » estime Mouloud Hédir. La preuve ? Elle vient d’être administrée par la récente « évaluation commune  » des résultats de 10 années d’application de l’Accord avec le partenaire européen.  « A ma connaissance, le dialogue engagé avec la partie européenne pour réévaluer l’accord d’association a touché à sa fin sans qu’aucun résultat consistant ne soit obtenu par l’Algérie  » indique l’expert algérien.

 Pour Mouloud Hedir « l’Algérie aurait pu mieux négocier avec la partie européenne « . Dans ce domaine les marges de manœuvre ne sont pas principalement commerciales contrairement à ce qu’on a pu lire dans les médias nationaux.

 « L’argument commercial est difficile à soutenir dans les négociations d’autant plus que si les exportations hors hydrocarbures stagnent, d’ailleurs vers toutes les destinations, ce n’est pas en raison essentiellement d’une supposée fermeture des marchés européens mais à cause de l’absence ou de l’insuffisance d’une offre nationale dans ce domaine.

 C’est plutôt le dialogue sur l’investissement avec les Européens qui aurait dû être plus « musclé « .  Les Algériens auraient dû mettre sur la table des négociations le lancement de grands projets avec l’UE. Des projets relatifs à des secteurs stratégiques tels que les télécommunications ou les énergies renouvelables. « Ce genre de grands projets auraient pu compenser le déséquilibre constaté au niveau de l’accord d’association » assure l’économiste algérien.

 

Accession à l’OMC : le mauvais calcul d’une démarche dilatoire

 

Négociations pour l’accession à l’OMC, accord d’association avec l’UE  » l’Algérie est engagée sur une multitude de fronts sans que les contours d’une stratégie d’ensemble cohérente semblent avoir été définis et portés à la connaissance du public algérien aussi bien que des partenaires internationaux de notre pays. « 

Pour l’expert algérien, « l’Algérie ne peut cependant pas se permettre d’être en dehors de l’OMC. Il n’y a pas un meilleur lieu pour défendre ses intérêts que d’être à l’intérieur de cette organisation « .  Dans ce domaine, c’est une démarche dilatoire consistant à « allonger les délais  » qui semble avoir de longue date la préférence des autorités algériennes. Aussi bien dans le cas de l’Accord d’association que de façon presque caricaturale dans celui de la négociation pour l’accession à l’OMC.

 « Mauvais calcul et mauvaise stratégie  » selon Mouloud Hedir. L’esprit des accords commerciaux signés par l’Algérie consiste à fixer des échéances auxquels les opérateurs économiques aussi bien que les administrations concernées doivent se préparer en effectuant leur mise à niveau. Ce que pour l’instant ni les unes ni les autres ne semblent, dans la plupart des cas, s’être résolus à faire.

 

 

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