Le Congrès national de néphrologie, qui a clôturé ses travaux aujourd’hui à l’ESHRA (Ain Ben+ian, Alger), a marqué deux jours d’échanges denses et cruciaux pour l’avenir de la prise en charge de l’insuffisance rénale en Algérie. Si la néphrologie algérienne a connu une évolution remarquable durant ces 30 dernières années, notamment par la mise en place de programmes de prévention et de dépistage régulier et constant des affections rénales, le chemin à parcourir reste semé d’embûches.
Le Pr. Tahar Rayane, président de la SANDT, a été clair : « L’accès à la greffe rénale reste cependant le seul défi qui nous reste à gagner dans les années à venir. » Face à une demande de transplantation croissante, le nombre d’opérations effectuées annuellement seulement 200 est nettement insuffisant. La solution idéale pour greffer le maximum de patients en liste d’attente réside inéluctablement dans le développement des prélèvements sur personnes décédées. C’est dans ce contexte de déficit structurel de la greffe que les travaux du congrès se sont concentrés sur la question fondamentale, comment offrir une qualité de vie décente aux patients insuffisants rénaux en attente d’une solution définitive ?
Le congrès, couvrant des thèmes essentiels comme la transplantation, la néphrologie clinique, la dialyse et la gestion des maladies chroniques, a mis en lumière un engagement fort de la communauté médicale. Les sessions ont abordé les stratégies internationales de transplantation (infections virales post-transplantation, vaccination), les défis cliniques locaux (tubulopathies, maladies héréditaires), et des sujets fondamentaux pour le contexte algérien comme la cardioprotection associée aux maladies rénales, le suivi nutritionnel, et la gestion des complications osseuses chez les patients dialysés. Les thèses soutenues, portant sur l’anémie ou l’impact des fistules artérioveineuses, ont prouvé la pertinence des études basées sur les réalités régionales d’Annaba, Oran et Blida.
La téléconsultation et télésurveillance : vers une vie normale pour le patient algérien
Le véritable tournant de ce congrès réside dans l’urgence de basculer vers des pratiques numériques pour une meilleure intégration du patient à la vie sociale. La maladie rénale ne doit plus signifier l’isolement et la simple survie ; elle doit permettre une vie normale. Les communications présentées ont martelé l’impératif de la modernisation du suivi.
La présentation du Dr. A. Karkar a suscité une vive réaction parmi les spécialistes en chiffrant l’impact concret de la télésurveillance. L’étude, basée sur les résultats de Wood et al (J Kidney Care, 2019), a comparé la prise en charge des patients sous dialyse péritonéale automatisée (APD) avec et sans la plateforme de télésurveillance Sharesource. Les chiffres sont éloquents. Avec l’APD seule, la majorité des actes médicaux étaient routiniers (46 %) ou réactifs (43,5 %), et seulement 8,5 % proactifs. Grâce à Sharesource, la part des actes proactifs bondit à 34,2 %, permettant une anticipation des problèmes et évitant les complications.
L’impact sur la charge de travail et la qualité de vie est également chiffré : le nombre de visites par patient et par an passe de 6,5 à 4,3, tandis que la durée moyenne de ces visites chute de 55 à 34 minutes. La télésurveillance s’impose donc comme une solution indiscutable pour la gestion et le suivi, offrant aux patients un meilleur contrôle via des applications comme MY PD.
Cette avancée est mise en perspective avec l’état de la téléconsultation en Algérie. Alors que des pays réalisent déjà des opérations à distance, l’Algérie est encore en attente, au minimum, d’une simple consultation à distance. L’urgence est d’adopter ces pratiques pour désengorger les centres et permettre aux professionnels de santé de se concentrer sur les cas les plus graves.
L’accent a également été mis sur la dialyse, considérée par les spécialistes comme le meilleur moyen en attendant la greffe. L’exemple de l’Arabie Saoudite, qui vise à faire de l’hémodialyse une activité indépendante pour le patient grâce à des machines à domicile (pour une séance rapide quotidienne), a été cité comme modèle à suivre, contrairement aux lourdes et longues séances biquotidiennes qui condamnent le patient à l’immobilité.
Au-delà de la science, le congrès a été un succès total en tant que plateforme d’échanges. Une dizaine d’exposants, majoritairement sponsors, mais aussi des jeunes entreprises, étaient présents. C’est le cas du pharmacien Ghefir Sofiane qui, après ses études en 2014 et un passage chez les laboratoires WELLNESS, a créé son propre remède naturel, BicaWell, une formule « confort et sécurité » aux multiples bienfaits pour la santé. Les interventions riches des participants ont rendu ces moments cruciaux, bénéfiques non seulement pour les professionnels de santé mais aussi pour les futurs médecins et pharmaciens, marquant un pas de plus vers l’excellence de la néphrologie algérienne.
