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Notes de lecture – L’Algérie a besoin d’un basculement salvateur de son management

Par Maghreb Émergent
15 juillet 2014
L'Algérie doit investir en urgence dans le savoir, avant qu'il ne soit trop tard, préconise Abdelhak Lamiri (Ph. N. Rondeleux)

Une autre orientation pour l’économie nationale est possible, explique l’économiste Abdelhak Lamiri dans son dernier ouvrage «La décennie de la dernière chance. Emergence ou déchéance de l’économie algérienne ? »* . Elle se veut pérenne, salvatrice, loin de tous les gourous de l’échec recommencé.

 

L’auteur, remet en cause toutes les politiques de développement depuis l’indépendance, et notamment l’option des industries industrialisantes des années 1970, basée sur un modèle bureaucratique et hyper centralisé. La sociologie politique est au cœur des échecs de développement et de transition, et les différents «clans qui s’affrontent au sein du pouvoir, neutralisent toute velléité de développement.»
Des conditions rigoureuses, dont l’efficacité managériale, sont requises pour qu’un processus d’industrialisation se transforme en développement. L’auteur revient sur les années 1990, où « l’atomisation des élites scientifiques a entraîné l’adoption de toutes les potions magiques contradictoires. » Il estime que l’élite scientifique a gagné en cohérence et qu’elle peut aider à l’émergence d’une classe politique au service du pays. Dans la préface, Abdelhak Lamiri situe l’ampleur du débat, parce que le pays a accumulé des richesses comme jamais auparavant et fait face aux pires dangers. Les risques géostratégiques aux frontières, les pires scénarios du printemps arabe et les convoitises des grandes puissances, focalisent les incohérences structurelles de l’économie algérienne et l’absence itérative d’un projet de société.
Eveil des élites

L’ouvrage, se veut le témoin de l’éveil des élites et du bouillonnement dans la société civile, pour échapper à la déchéance et construire une alternative, expression d’une économie compétitive, hors hydrocarbures. Plus de 50% de l’ouvrage et des tableaux de recommandations, sont consacrés aux actions salutaires à entreprendre, dans les différents secteurs. Il est construit sur le background d’une importante expérience de terrain.
Sur le plan théorique, il montre que la réalité algérienne, n’est pas rétive à l’approche scientifique des sciences sociales. L’auteur retient le caractère spécifique lié à chaque expérience de développement, mais également ses aspects opératoires qui ouvrent la voie vers des solutions à même de servir, et il est rare qu’ « un modèle économique ou managérial ne soit pas transposable.»

Une question de management

Le management est au cœur de la problématique développée ici, à l’image de celle du Japon qui a puisé dans sa culture profonde, des traditions managériales qui ont damé le pion à l’Occident. L’auteur énonce une vérité érigée en sagesse : « ce qui nous arrive découle de ce que nous sommes ». Les échecs, ne sont pas le fruit du hasard. Nous sommes les légataires de notre passé, de notre ancrage historique et culturel. Nos errances passées, nourrissent nos échecs accumulés et sans cesse recommencés et contribuent à nous amarrer à la logique infernale, du « développement du sous- développement ».
A ce stade, il met le doigt sur les mécanismes inducteurs de l’impasse. Ceux-ci, relèveraient de comportements humains intuitifs qui obèrent définitivement la capacité d’un pays à se développer. La culture analytique, elle, permet d’accéder à la rationalité de la gestion, à l’utilisation de simulateurs économiques et à l’introduction de méthodes quantitatives qui «neutralisent les données subjectives ».

La réforme au temps de l’hyper-bureaucratisme

Le pays a engagé les réformes pour une « économie de marché », avec la mentalité (la sociologie politique) d’un Etat bureaucratique hyper centralisé. La différence qui existe entre la démarche intuitive dans le développement, qui est souvent fausse et qui cause des ravages dans les ressources, et la posture analytique, c’est celle qui existe entre la Corée du Sud, pays sans ressources naturelles, devenu dragon asiatique, et l’Algérie qui développe une culture intuitive sans limite et où les décisions sont prises sur des bases subjectives.
L’ouvrage relève : de 1990 à 2005, les subventions, assainissements financiers et crédits de complaisance, ont dépassé les 60 milliards de dollars. Si l’on avait injecté ces ressources dans un nouveau tissu de PME/PMI, l’économie aurait crée l’équivalent de plus de deux millions d’emplois, un triplement de la capacité de production des entreprises publiques et un développement de leur potentiel d’exportation.

Basculer de l’intuitif à l’analytique

Comment passer du comportement intuitif à la culture analytique ? C’est tout un projet de formation au management des élites, qui est donné ici et toute la problématique de l’auteur est : comment cesser d’être intuitif dans la décision stratégique et basculer progressivement vers la culture analytique ? Il réaffirme le lien dialectique, entre la théorie et la pratique et la vigilance liée à l’amélioration des connaissances, des modèles économiques et des pratiques elles-mêmes. La formation énonce-t-il, est le levier le plus puissant, pour réussir la transition parce que, « le facteur clé de toute réussite, est la mobilisation de l’intelligence collective.»

*Editions Chihab 2013 – 290 pages
Prix public : 950 DA.

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