L’OAPEC prévient : renoncer au pétrole et au gaz serait une erreur. Un discours qui trahit surtout la peur de l’après-pétrole, alors que les économies arabes restent prisonnières de la rente et peinent à engager une vraie transition énergétique.
Le secrétaire général de l’OAPEC ne tourne pas autour du pot : “abandonner le pétrole et le gaz serait dangereux”, a-t-il lancé ce mardi à Koweït City lors d’une conférence spécialisée sur l’énergie. Ce n’est pas seulement un constat, c’est une défense de rente. Un rappel que, pour les pays arabes producteurs, la transition énergétique reste une menace avant d’être une opportunité.
Le discours est rodé : le pétrole et le gaz seraient « l’épine dorsale » des économies arabes, et la transition ne devrait en aucun cas signifier leur abandon. On parle d’ « équilibre », d’ « efficacité », d’hydrogène bleu et de captage du carbone. Bref, tout ce qui permet de prolonger la rente sans la remettre en cause.
Pour donner le change, le secrétaire général brandit des chiffres : « Les investissements dans les énergies renouvelables dans le monde arabe ont augmenté de 35 %, atteignant plus de 18 milliards de dollars », lit-on dans Attaqa. De quoi impressionner à première vue. Mais replacés dans la balance des centaines de milliards générés chaque année par les hydrocarbures, ces montants pèsent peu.
Derrière la rhétorique, l’angoisse du baril
Derrière la rhétorique, il y a une angoisse évidente. Celle de voir la demande mondiale s’éroder, de perdre une rente qui finance régimes et budgets, de devoir réinventer des économies prisonnières du baril. L’avertissement vise moins le monde que les opinions publiques arabes : rassurer, maintenir l’idée que le pétrole restera longtemps au centre du jeu.
Mais le monde, lui, avance. Les majors pétrolières occidentales se repositionnent sur l’éolien et l’hydrogène vert. Les marchés financiers imposent de plus en plus de contraintes vertes. Les politiques climatiques, malgré leurs limites, accélèrent la pression. Dans ce contexte, insister sur la « centralité » du pétrole ressemble à une stratégie défensive, presque désespérée.
Le paradoxe est là : en voulant protéger le présent, l’OAPEC fragilise l’avenir. Le jour où la demande mondiale chutera pour de bon, quand les renouvelables seront compétitifs partout et que les prix du brut s’effondreront, les économies qui auront misé sur l’attente plutôt que sur l’anticipation seront les premières à payer l’addition.
Ce discours dit tout haut ce que beaucoup pensent encore en silence dans les capitales productrices : l’après-pétrole fait peur. Mais l’histoire ne se ralentit pas avec des slogans.