Dans le dernier classement des monnaies africaines publié par Forbes, trois devises du Maghreb figurent parmi les plus solides du continent. Le dinar algérien, lui, demeure l’une des plus faibles. Un écart qui interroge les fondements de la politique monétaire menée par Alger depuis plusieurs décennies.
Avec un taux de change dépassant 130 dinars pour un dollar, la monnaie algérienne affiche une dépréciation continue face aux devises de ses voisins immédiats. Le dinar tunisien s’établit à 2,9 pour un dollar, le dinar libyen à 5,4, tandis que le dirham marocain se maintient autour de 9,2. Sur le marché parallèle algérien, l’euro s’échange à plus de 27 000 dinars pour 100 euros, révélant la distorsion entre taux officiel et réalité économique.
À l’échelle du continent, le classement de Forbes confirme la domination des monnaies maghrébines, suivies par celles de quelques économies à la politique monétaire plus stable. Derrière la Tunisie, la Libye et le Maroc, figurent notamment le cedi ghanéen, la pula botswanaise, la roupie seychelloise et le rand sud-africain.
Toutes partagent un point commun à savoir, des banques centrales plus autonomes, des régimes de change flexibles et une maîtrise de l’inflation qui renforcent la confiance dans leur devise.
| Rang | Pays | Monnaie | Taux de change (≈ pour 1 USD) |
|---|---|---|---|
| 1 | Tunisie | Dinar tunisien (TND) | 2,90 |
| 2 | Libye | Dinar libyen (LYD) | 5,40 |
| 3 | Maroc | Dirham marocain (MAD) | 9,04 |
| 4 | Ghana | Cedi ghanéen (GHS) | 12,31 |
| 5 | Botswana | Pula botswanais (BWP) | 14,15 |
| 6 | Seychelles | Roupie seychelloise (SCR) | 14,84 |
| 7 | Érythrée | Nakfa érythréen (ERN) | 15,00 |
| 8 | Afrique du Sud | Rand sud-africain (ZAR) | 17,23 |
| 9 | Lesotho | Loti du Lesotho (LSL) | 17,26 |
| 10 | Namibie | Dollar namibien (NAD) | 17,26 |
| — | Algérie | Dinar algérien (DZD) | ≈ 133,00 |
Quand le modèle rentier fragilise la monnaie
Cette hiérarchie monétaire traduit des choix économiques divergents. La Tunisie et le Maroc ont progressivement diversifié leur tissu productif- industrie manufacturière, services, tourisme- tout en adoptant des régimes de change plus souples. La Libye, malgré une situation politique instable, maintient sa devise grâce à un contrôle strict du taux et à la rente pétrolière.
L’Algérie, en revanche, reste tributaire d’un modèle rentier fondé sur les hydrocarbures et d’une politique de change administrée par la Banque centrale. Cette rigidité a permis de limiter la volatilité, mais au prix d’un décalage croissant avec les réalités du marché et d’une perte de confiance des agents économiques.
Les conditions d’un redressement
L’inflation algérienne demeure supérieure à celle de ses voisins, tandis que le secteur privé peine à se développer dans un environnement marqué par la faiblesse de l’intégration régionale. Pour les observateurs, la restauration de la crédibilité du dinar suppose une réforme en profondeur : assouplissement du régime de change, renforcement de la transparence de la Banque centrale, diversification économique.
Le classement Forbes rappelle une réalité souvent négligée : la stabilité monétaire ne dépend pas de la richesse en ressources naturelles, mais de la qualité de la gouvernance économique. Au Maghreb, trois pays parviennent à préserver la valeur de leur monnaie. Le quatrième, malgré ses réserves en hydrocarbures, continue de perdre du terrain.





