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Contributions

Restaurer la confiance, sauver l’impôt

Par Slim Othmani
13 mai 2025

Que devient l’impôt lorsque la confiance s’effondre, lorsque la transparence se brouille, lorsque le lien civique s’érode ? Cette réflexion n’a d’autre prétention que d’exprimer une interrogation sincère, née d’un cheminement personnel, sur les racines de la défiance fiscale et les conditions nécessaires à une refondation possible. Les défis budgétaires que doivent aujourd’hui affronter les gouvernants, dans un contexte de graves bouleversements économiques mondiaux, imposent plus que jamais un sursaut citoyen. Mais ce sursaut ne pourra advenir sans un engagement tout aussi conséquent des États en faveur d’une gouvernance plus lisible, plus équitable, plus recevable. Élaborer une assiette fiscale élargie sans compromettre la stabilité sociale suppose d’abord de rétablir un pacte de confiance. Ce texte n’est qu’une invitation à réfléchir ensemble sur ce défi silencieux qui, s’il demeure ignoré, fragilisera demain bien plus que les finances publiques.

L’impôt, miroir de la confiance

Depuis des années, en observant la progression inexorable de l’économie informelle dans nos sociétés d’Afrique du Nord, une question n’a cessé de me hanter : pourquoi ce détachement progressif de tant d’acteurs économiques, petits ou grands, du système fiscal officiel ? Pourquoi cette difficulté chronique à élargir durablement l’assiette de l’impôt ?
Longtemps, j’ai cru qu’il suffisait de moderniser, de simplifier, de réformer. Mais à force d’observer, une évidence plus profonde s’est imposée : l’impôt n’est pas seulement une affaire de procédures. Il est, avant tout, le miroir de la confiance que les citoyens placent dans leur État.
On accepte de contribuer lorsqu’on croit à l’usage qui sera fait de son effort. On consent à l’impôt quand il est perçu comme un engagement mutuel, non comme une simple ponction. Lorsque la confiance vacille, l’impôt perd son sens. Il n’est plus l’expression d’une appartenance à une communauté politique, mais devient une charge imposée sans contrepartie visible.

Une défiance construite

Le vide de sens qui entoure l’impôt aujourd’hui n’est pas tombé du ciel. Il est le résultat d’une série d’errements : complexité fiscale incompréhensible, pression jugée confiscatoire, inégalités face aux obligations, usage opaque des ressources, recul des services publics visibles.
À cela s’ajoute une logique politique inquiétante : face au désengagement fiscal, beaucoup d’États ont préféré la répression administrative à la reconstruction du lien civique. On sanctionne, on punit, on contrôle massivement, au lieu de restaurer la confiance par la clarté, l’équité, l’écoute — et la recevabilité (redevabilité-accountability) véritable des gouvernants devant ceux qui contribuent.

La fracture civique

Ainsi s’installe un cercle vicieux : plus l’impôt paraît injuste, plus il est contourné ; plus il est contourné, plus la pression s’accroît sur ceux qui restent ; plus la pression grandit, plus la défiance s’approfondit.
À terme, c’est la notion même de bien commun qui s’efface, remplacée par des stratégies individuelles de survie.
Dans cet environnement, l’impôt n’est plus un acte civique ; il devient un impôt subi, déconnecté de toute fierté citoyenne.

L’urgence d’une refondation

Sortir de cette spirale exige bien plus que des réformes techniques. Il faut restaurer l’idée que l’impôt est un pacte volontaire entre citoyens et institutions légitimes. Cela passe par la transparence réelle, par une gestion publique visible, par une fiscalité compréhensible et équitable, mais aussi par une exigence accrue de recevabilité (redevabilité-accountability), où ceux qui perçoivent les ressources doivent rendre compte clairement de leur usage. Toute réforme fiscale véritable devra inscrire, en tête de son projet, et comme condition sine qua non, la restauration de la confiance, seule capable de garantir l’adhésion durable des citoyens et le succès de l’effort collectif.

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