Le constructeur automobile a franchi le cap des 50 000 véhicules assemblés à Oran en 2025, contre 17 000 l’année précédente. Cette montée en puissance s’inscrit dans un repositionnement géographique face au ralentissement européen et aux tensions avec Pékin.
Stellantis a publié, le 10 octobre, ses résultats trimestriels en hausse de 13 % au troisième trimestre 2025, avec 1,3 million de véhicules livrés dans le monde. Au sein de ces chiffres globaux, la région Moyen-Orient-Afrique enregistre la progression la plus marquée, avec une croissance de 21 % sur un an. Cette performance repose en partie sur le démarrage rapide de l’usine d’assemblage de Tafraoui, près d’Oran, inaugurée fin 2023.
Le site a produit plus de 50 000 unités au cours des neuf premiers mois de 2025, soit un triplement par rapport aux 17 000 véhicules sortis d’usine en 2024. Actuellement consacré à l’assemblage de la Fiat 500 et du Doblo, l’outil industriel doit accueillir d’ici la fin de l’année la production de la Grande Panda. Stellantis projette d’atteindre 90 000 véhicules assemblés en 2026, avec un taux d’intégration locale fixé à 35 %, contre environ 15 % aujourd’hui.
Cette accélération marque une inflexion dans la stratégie industrielle du groupe. À Oran, l’usine ne se limite plus à un montage de véhicules; elle réalise désormais les opérations de ferrage et de peinture, signe d’une intégration accrue de la production sur le territoire. Ce changement d’échelle, coûteux en équipements et en compétences, répond aussi aux critères d’éligibilité aux incitations fiscales prévues pour les projets industriels à forte valeur ajoutée. Pour les autorités, qui misent sur la substitution aux importations afin de contenir un déficit commercial persistant, le développement d’un tissu productif local constitue un objectif autant économique que politique.
Un repositionnement face au ralentissement européen
Pour Stellantis, ce développement répond à une logique de diversification géographique. Le marché européen, qui représente encore plus de 50 % des ventes du groupe, connaît un ralentissement depuis 2023. Les ventes de véhicules neufs dans l’Union européenne ont reculé de 3 % au premier semestre 2025, selon l’Association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA). Dans ce contexte, les marchés émergents, notamment en Afrique du Nord et au Moyen-Orient, offrent des perspectives de croissance supérieures, malgré un niveau de maturité encore faible.
L’Algérie, avec un parc automobile d’environ 7 millions de véhicules pour 45 millions d’habitants, affiche un taux d’équipement inférieur à la moyenne régionale. La demande reste soutenue, portée par une démographie dynamique et par l’urbanisation. Toutefois, le pouvoir d’achat des ménages demeure contraint par une inflation élevée, estimée à 9,3 % en 2024 par le Fonds monétaire international (FMI), et par un marché du travail peu dynamique.
Le renforcement des capacités en Algérie s’inscrit dans une stratégie plus large de Stellantis en Afrique du Nord. Le groupe a doublé la production de son usine de Kénitra, au Maroc, qui fabrique notamment la Peugeot 208 et l’Opel Corsa. Au total, le dispositif industriel maghrébin du constructeur représente désormais plus de 200 000 unités de capacité annuelle. Cette implantation permet également de limiter l’exposition du groupe aux tensions commerciales avec la Chine, où Stellantis peine à rivaliser avec les constructeurs locaux, en pleine montée en gamme.
Pour les autorités algériennes, le projet Fiat constitue un test de la politique de réindustrialisation. Le secteur automobile, qui employait près de 30 000 personnes avant 2020, avait subi un repli marqué après la suspension de plusieurs projets d’assemblage. La relance de Tafraoui s’accompagne d’engagements en matière de transfert de technologie et de développement d’une filière de sous-traitance locale.