Derrière sa politique migratoire envers l’Algérie, Rome dévoile une stratégie économique calculée. Le gouvernement Meloni vient d’inclure l’Algérie dans son Rapport 2025 sur les pays d’origine sûrs, accélérant le traitement des demandes d’asile de ses ressortissants.
En façade, l’Italie affiche une fermeté exemplaire face à l’immigration irrégulière. Mais les chiffres racontent une autre histoire: 450 000 travailleurs étrangers accueillis en deux ans, dont une part significative en provenance des pays nord-africains. Cette apparente contradiction s’explique par une approche pragmatique dictée par les besoins criants du marché du travail italien.
Le “Decreto Flussi”: la porte entrouverte pour les travailleurs algériens
Récemment adopté par le Sénat italien avec 99 voix contre 65, le “Decreto Flussi” représente l’incarnation de cette stratégie économique. Cette loi ouvre 181 000 opportunités d’emploi aux ressortissants de 19 pays, dont l’Algérie, désignés comme « sûrs » par Rome.
Pour les travailleurs qualifiés algériens, ce décret constitue une opportunité sans précédent d’accéder légalement au marché du travail italien. Simultanément, il permet à l’Italie de sélectionner précisément les profils correspondant à ses besoins économiques sectoriels, notamment dans le bâtiment, l’agriculture et les services à la personne.
Des flux financiers considérables entre les deux rives
Les implications économiques de cette politique dépassent largement le cadre du marché du travail italien. Les transferts de fonds des travailleurs algériens vers leur pays d’origine représentent un flux financier considérable qui contribue significativement à l’économie algérienne.
Selon la Banque d’Algérie, ces remises constituent la deuxième source de devises étrangères pour le pays après les hydrocarbures. L’augmentation potentielle du nombre de travailleurs algériens en Italie pourrait donc renforcer indirectement l’économie algérienne, créant une interdépendance financière qui renforce les liens bilatéraux.
Il va sans dire que la politique migratoire italienne envers l’Algérie ne peut être dissociée des intérêts énergétiques croissants entre les deux pays. Depuis la crise ukrainienne et la réduction des approvisionnements en gaz russe, l’Italie a considérablement renforcé sa coopération énergétique avec Alger.
En effet, les accords migratoires font partie d’un package diplomatique plus large. En facilitant l’immigration légale des travailleurs algériens, Rome consolide sa position privilégiée pour l’accès aux ressources gazières algériennes, essentielles à la sécurité énergétique italienne.
Yasser K.