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Un projet de loi pour relancer la dynamique des PME en débat à l’APN : l’Etat gâte-t-il le privé ?

Par Oussama Nadjib
14 novembre 2016

                                                                   

Le nouveau projet de loi part d’un constat que les résultats du programme de mise en valeur des PME lancé en 2012 sont peu probants et vise à corriger les choses en sortant d’un modèle-standard d’aide aux PME pour une approche qui colle aux besoins de l’entreprise. Pour les députés du PT, on est dans une logique de bradage de la propriété de l’Etat en faveur d’un secteur privé trop « gâté ».

 

Le projet de loi sur les petites et moyennes entreprises (PME/PMI) a été présenté dimanche à l’Assemblée Populaire Nationale (APN) par le ministre de l’Industrie et des mines, Abdessalem Bouchouareb au cours d’une séance plénière présidée par Mohamed Larbi Ould Khelifa, président de la première chambre du parlement. Une séance «tranquille » qui n’a pas drainé la «foule » parmi les députés.

 Le projet de texte qui amende la loi de 2001 relative à la Petite et moyenne entreprise (PME) comporte des mesures de soutien à la création des PME, à la recherche et développement, l’innovation et au développement de la sous-traitance. Il prévoit des financements d’actions de sauvetage et de reprise des activités des PME en difficulté mais viables ainsi que la mise en place d’un Fonds d’amorçage pour encourager la création et le décollage de de start-ups.

 Le Fonds vise à financer les frais de départ (R&D, prototypage, business plan…) pour permettre aux détenteurs de projets de passer l’écueil de départ qu’est l’absence de financement dans la période de gestation de l’entreprise.

 La nouvelle loi part également d’un constat mitigé sur le programme de mise à niveau des PME de 386 milliards de DA, lancé en 2012 qui ciblait 20.000 PME mais qui n’a suscité l’adhésion que de 5000. L’une des causes est le fait que le programme ne colle pas aux besoins précis des entreprises car fonctionnant sur un modèle-standard. Le nouveau projet sort de ce modèle pour permettre d’apporter des aides en fonction des besoins spécifiques et réels de l’entreprise.  L’autre objectif de la loi est de réduire leur taux de mortalité des PME qui est estimé, selon un chiffre rapporté par APS, à 8%.

 

Quel est le bilan ?

 

Mais est-ce la bonne solution ? L’approche laisse sceptique Djelloul Djoudi, député du Parti des Travailleurs (PT) et membre de la commission des finances à l’APN. Selon lui, les PME ne peuvent pas apporter de valeur ajoutée à l’économie nationale si l’on ne crée pas des pôles industriels qui leur permettront de se lancer dans la sous-traitance.

 Le projet de loi sur la PME manque de vision de vision économique, estime-t-il. « Les PME auxquelles l’Etat facilite la tâche ne sont rien qu’un moyen de corruption» relève-t-il.  Son collègue du PT, Ramdane Taazibt est tout aussi tranchant : «Le gouvernement marche les yeux fermés ».   Smain Kouadria estime que la question de sous-traitance industrielle pose le problème du rôle de l’Etat (accompagnement) qui n’est pas défini dans ce projet de loi.

 Smain Kouadria a focalisé sur l’article 04 du projet de loi sur les PME qui selon lui prépare le terrain à la mise en place de l’article 75 du PLF 2017. L’article stipule que les entreprises fermées ou en difficulté qui se situent dans des zones industrielles appartenant à l’Etat seront mises à la disposition du secteur privé.

 Une disposition conforme à l’art 75 du projet de loi de finances 2017 qui permet à des personnes morales privées de créer et de gérer des zones industrielle sur des terrains non agricoles qui leur appartiennent ou relevant du domaine privé de l’Etat sur la base d’une concession de gré à gré de 33ans assortie d’un abattement sur le prix en fonction de l’implantation géographique du projet.

 « C’est vrai que ce projet de loi parle du développement, de l’orientation et de l’accompagnement des PME, mais personne ne dispose des bilans des PME lancées depuis l’an 2006…Ou sont les bilans ? » s’interroge Smain Kouadria. Les députés du PT dénoncent d’une seule voix l’article 4 qui est, selon eux, un renoncement de l’Etat à ce qui relève de la propriété nationale publique. Ramdane Taâzibt le résume de manière laconique : «L’Etat gâte le privé ».

Loin de l’objectif d’un million de nouvelles PME

  Le projet de loi est défendu par le député du FLN Mohamed Djemaï pour qui il n’existe pas d’économie sans PME. Il faut encourager la sous-traitance qui est une affaire de petites et moyennes entreprises dit-il en relevant que 17% de ces PME ont disparu cette année. Cela nécessite, indique-t-il, une «veille importante. »

  Djaouida Benslimani, également du FLN, insiste sur l’accompagnement financier des PME pour leur garantir la continuité sur le marché. Le nombre des PME en Algérie atteindrait les 900.000, loin du potentiel du pays. Et encore très loin des objectifs du gouvernement qui ambitionne de favoriser la création d’un million de nouvelles PME durant le quinquennat 2015-2019.

 

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