De l’importation à la production locale, de jeunes entrepreneurs algériens cassent les prix des médicaments dans un secteur dépendant de l’étranger depuis des décennies.
Dans une salle de conférence d’Alger, ce lundi 3 novembre, plus de 800 professionnels se pressent. Pharmaciens, industriels, biologistes, étudiants. Tous sont venus écouter le ministre de la Santé et de l’Industrie pharmaceutique vanter les mérites de la qualité dans le médicament. Un discours classique, presque convenu.
Mais derrière les stands et les présentations PowerPoint, une autre réalité émerge. Celle d’une génération qui refuse d’attendre les solutions de l’État et décide de prendre le problème à bras-le-corps. Dans une industrie pharmaceutique algérienne accro à l’importation depuis des décennies, ils tentent le pari risqué de la production locale.
Coperdis : quand l’importateur devient fabricant
L’histoire de Coperdis commence comme beaucoup d’autres dans le pays. Pendant des années, l’entreprise importe des lecteurs et des bandelettes de glycémie depuis la Corée. Un business qui marche, un partenariat industriel confortable avec une société coréenne, mais qui reste dans la zone de confort de l’importation.
Puis vient le tournant. Coperdis décide de franchir le pas : produire localement à Zaoui, dans la région de Blida. Le résultat dépasse les attentes. Le produit, vendu auparavant à 9 800 dinars, est désormais disponible à 1 500 dinars. Une division par six du prix pour le patient.
Une démonstration par l’exemple que l’industrie pharmaceutique locale peut répondre à des standards de qualité et d’efficacité. La souveraineté sanitaire n’est pas qu’un slogan, c’est une réalité accessible.
VitaCheck suit la même trajectoire. Spécialisée dans les produits de diagnostic, l’entreprise fabrique désormais sur place ce qu’elle importait hier à prix d’or. Deux success stories qui prouvent qu’on peut concurrencer les multinationales du secteur, même depuis Blida.
BMvie, le pari du logiciel hospitalier made in Algeria
L’innovation ne se limite pas aux médicaments. En 2017, deux jeunes étudiants ont fondé BMvie. Leur idée : développer un logiciel de gestion pour les hôpitaux et laboratoires algériens, en combinant leur passion pour la tech et la santé.
Leur solution permet la gestion des rendez-vous, des hospitalisations, du suivi des médicaments en temps réel, et répond aux standards du ministère de la Santé comme aux normes internationales. “Dans un environnement en constante évolution, notre solution s’adapte aux besoins des établissements”, explique Younes Sahnoun, délégué commercial de BMvie.
Un logiciel algérien, pensé pour le contexte local, mais avec des exigences de niveau mondial. Encore une preuve que la nouvelle génération d’entrepreneurs ne se contente plus de suivre, elle veut créer.
Le grand absent : l’accompagnement de l’État
Pourtant, malgré ces réussites, un constat s’impose lors de cette journée nationale. Les conférences d’experts et les discours officiels ne suffisent pas. Ce qui manque cruellement au secteur, c’est un véritable accompagnement institutionnel qui permettrait à ces jeunes pousses de passer à l’échelle supérieure.
Les entrepreneurs algériens du médicament ont prouvé qu’ils savaient innover, produire et s’imposer sur un marché longtemps verrouillé par l’importation. L’État devra maintenant créer l’écosystème nécessaire pour transformer ces success stories isolées en véritable révolution industrielle.





