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Maghreb

Le professeur Boucekkine met en modèle économétrique le changement politique dans les autocraties

Par Saïd Djaafer
30 juin 2017
Le professeur Raouf Boucekkine (Crédit photo F.Dubessy)

 

 Les membres de la société d’économétrie attendaient l’intervention du prix Nobel Jean Tirole. Ils ont eu droit à un autre moment fort avec une keynote qui parlait beaucoup aux africains, algériens en tête.

 Le scénario d’un changement révolutionnaire dans les pays autocratiques d’Afrique et du monde arabe peut devenir mathématiquement prédictible. Il est lié à de nombreux facteurs logés dans un modèle d’équations qui en évaluent la probabilité de la survenance.

C’est au professeur Raouf Boucekkine, que la première journée de la rencontre africaine de la société d’économétrie qui se tient à l’école supérieure de banque de Bouzaréah doit son second temps fort après la keynote inaugurale du professeur Jean Tirole prix Nobel d’économie. Les datas disponibles suggèrent que l’équilibre redistribution-répression dans les politiques budgétaires est une variable significative de l’équation.

 « Dans les pays qui ont connu le printemps arabe, on peut constater en examinant le contenu des dépenses publiques qu’elles étaient orientées plus comme des dépenses publiques universelles aux premières années de l’indépendance et qu’elles sont devenues plus des dépenses publiques particulières ensuite » a expliqué le professeur Boucekkine directeur scientifique à Aix-Marseille Schools of Economics.

 Il a également suggéré que plus les gens étaient éduqués et plus leurs exigences citoyennes étaient fortes et donc leur pression pour le changement grandissante. « Une partie des élites peut devenir un acteur » du mouvement révolutionnaire dans les autocraties.

 Pour autant l’intérêt des régimes autocratiques qui veulent durer n’est pas de maintenir les populations à l ‘écart de l’éducation (expérience coloniale) car la croissance économique forte est le meilleur moyen de se maintenir au pouvoir. Même si cette croissance génère des inégalités, à condition de ne pas descendre sous un point de rupture dans le couple redistribution-répression.  Pour pouvoir soutenir cette croissance forte dans la durée, le niveau d’éducation domestique ne peut donc pas être bas.

 Boumediene versus Mobutu

Le passionnant exposé du professeur Boucekkine s’est poursuivi sur la formalisation des facteurs du changement avec au cœur du modèle le cout direct du changement (direct switiching coast- DSC).

 C’est l’évaluation de ce DSC qui, a par exemple, amené le professeur à pronostiquer une poursuite de la stabilité politique en Algérie en 2011, lorsque beaucoup d’observateurs ce sont hasardés à parier sur l’extension du soulèvement démocratique arabe vers Algérie.

«La révolution détruit du stock de capital humain » a-t-il rappelé, c’est un test cout-bénéfice qui rend le changement plus attractif ou pas, pour les citoyens. Le DSC serait de ce point de vue même plus important que le niveau des inégalités dans le choix de l’option du changement, y compris par le soulèvement populaire, sous les régimes autocratiques.

 L’intervention du professeur Boucekkine a également traité du paramètre des ressources naturelles et de sa corrélation avec la longévité des régimes autocratiques. Il a montré qu’il n’y avait pas une option unique et que ce qui était le plus important était non pas la présence de richesses naturelles dans un pays, mais la manière dont elles sont utilisées.

 Il a évoqué pour illustrer son propos, les deux itinéraires de Houari Boumediene en Algérie et de Mobutu en ex Zaïre (RDC). Le professeur Boucekkine est l’un des principaux inspirateurs du plan triennal de cadrage budgétaire algérien 2017-2019. Il fait partie de la task-force économique auprès du Premier ministère.

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